La CAGOUILLE dans les Arts

LA CAGOUILLE DANS LES ARTS

          La renommée del'escargot - notre Cagouille - s'étend bien au-delà de l'Art Gastronomique. Les artistes lui ont donné une place honorable dans leurs oeuvres. Cet animal, tranquille, humble, discret, a intéressé le ciseau des sculpteurs, comme le crayon des dessinateurs, la plume de 'écrivain comme celle du musicien. Au XVme siècle surtout, dessins, enluminures, tapisseries, céramiques, sculptures, tousles arts se tournent vers la nature pour la copier et n'oublient pas ce compagnon du feuillage qu'est notre Cagouille. Et, c'est alors, "Le Grand Siècle" du limaçon. En architecture, la spirale de sa coquille a servi de base à la conception de l'escalier dit "en colimaçon". Cette même spirale est un thème de décoration fréquemment employé : panneaux, murs, plafonds sont revêtus de décors plus ou moins somptueux sur lesquels s'harmonisent lignes droites, courbes et spirales.

                              La Cagouille et LA SCULPTURE  

Jusqu'à la Renaissance, en tant que symbole de la résurrection dans la religion catholique, les sculpteurs l'ont interprété de diverses façons :églises de Troyes, de St Rémy à Reims, de Tours sur Marne (marne), reliquaire de St Sebald à Nuremberg en sont les témoignages. Voici, également, dans la meme idée, la sculpture d'un chapiteau du XIIIme siècle, çà l'église de Lescar (pyrénées atlantiques) : deux créatures semblent se débattre dans les griffes des démons. Les deux Cagouilles sculptées à la partire supérieure symbolisent la résurrection des deux âmes.        

                Mais à partir de la Renaissance, toute idée de symbole est abandonnée. Les sculpteurs s'inspirent directement de la nature et nous assistons alors à la floraison de feuillages accompagnés de leurs animauc ou insectes familiers. Dans les églises, les thèmes de décoration sont les feuilles de vigne, de scarole, de chou frisé et les Cagouilles se promènet sur leurs feuillages de prédilection, comme on peutle voir dans l'église de Sommepy (Marne). Une visite à travers la France en ferait découvrir de multiples exemples. La sphéricité de la coquille s'y détache en relief et laprésence de notre mollusque y met la note de mouvement, soit dit sans ironie quant à sa renommée de lenteur. 

          De nombreux monuments et églises du XVme siècle sont sculptés de frises de feuillagesavec Cagouilles. La porte d'entrée du musée de Cluny à Paris, s'orne de feuilles de vigne ; la piscine de la chapelle du château de Vincennes, de feuilles de chou frisé, ainsiq ue la gorge extérieure de la grande ogive de la porte centrale de l'église St Merri à Paris. Des feuilles de vigne ornent également le chapiteau de la nef de l'église St Loup à Câlons sur Marne. La cheminée de la salle des Tombeaux au musée de Dijon est ornée de feuilles de scarole tandis que celle de la salle des Gardes sculptée n 1503 par DANGERS, l'est de feuilles de vignes. Et toujours, nous retrouvons notre limaçon animant ces feuillages. A Dijon encore à l'intérieur de la "grande vis" du Palais des Ducs datant de 1430, on remarque, sur un culot, une Cagouillesur une feuilles de chou frisé. D'après J.GIRIEUD : "La Cagouille est maintes fois figurée dans les sculptures gothiques des monuments rouennais, principalement dnas les frises de feuilles de chou et de vigne. Il y en a de nombreux exemples dans les culs-de-lampe des niches de la salle des Pas-Perdus au Palais de Justice . On voit même un gigantesque limaçon placé dans la gorge de la corniche en bois de cette même salle".

             A Troyes, des Cagouilles s'échelonnent sur le dessus de porte de l'église Ste-Madeleine. Par ailleurs, au Louvre se trouve un bronze remarquable de la Renaissance Italienne de l'école de Padoue datant de la fin du XVme siècle. Il est intitulé le "Gnome à l'escargot". Un superbe limaçon, toutes cornes dehrs, sert de monture à un enfant. Cet enfant songe-t-il au temps qu''il lui faudra pour arriver à bon port assurément ! Plus loin, on peut voir un dressoir des Flandres, en chêne sculpté de grappes de raisin sur lesquelles se promène, avec délices; une Cagouille.

                     La Cagouille et la CERAMIQUE

Bernard PALISSY, au XVème siècle, décore ses plats de nombreux coquillages, de serpents, de crustacés. Le relief des Hélix ser à souhait sa manière. Parmi ses oeuvres, où figure LA CAGOUILLE, on peut citer : un grand vase à boire ou hanap que l'on peut admirer au Musée du LOUVRE ainsi qu'une coquille moulée en forme de vase, et une gourde de chasse. On attribue à Bernard PALISSY un couple de CAGOUILLES qui devaient vraisemblablement servir de salerons (Musée de la Manufacture de SEVRES).

La Renaissance Italienne avec ses superbes plats d'Urbino, de Castel-Duranté, de Gubbio, stylise plus ou moins les hélices ou s'en inspire. 

Au Musée de la Manufacture de SEVRES, un petit bourdaloue de poupée en faïence de Strasbourg s'orne, dans le fond, d'une CAGOUILLE qui dresse les cornes. Ici se place une anecdote qu'il est peut-être utile de rappeler : la longueur des sermons de Bourdaloue, prédicateur éminent du XIIIème siècle avait rendu utile l'empli direct de cet objet qui finit par porter le nom du célèbre orateur.

C'est encore la rotondité d'une coquille de CAGOUILLE qui sert de bouton au couvercle d'une saucière de la Fabrique Vve PERRIN à MARSEILLE (Musée des Arts Décoratifs°.

Au Musée de la Manufacture de SEVRES on peut voir au sommet d'un immense bouquet de fleurs qui orne un panneau décoratif en faënce de DELFT une CAGOUILLE, tête en bas, regarder et mesurer le chemin qu'il faut parcourir pour retrouver la terre ferme ; mais quel chemin parfumé !

La même Manufacture fait entrer la coquille de l'hélix dans le décor d'un service à vins intitulé  " Bords de rivières et fleuves de France, XIXème siècle" ainsi que dans un service décoré par l'ornemaniste LEROY.

Enfin, un superbe biscuit, aux lignes très pures, modèle de GARDET, n ous fait assister à l'attaque d'une CAGOUILLE par deux rats gourmands. La céramique moderne, elle aussi, utilise fréquemment notre limaçon. Là, sa coquille vernissée de toutes teintes sert de calendrier ; plus loin, deux CAGOUILLES sur une feuille de vigne s'offrent comme salerons. Une autre s'allonge au bord d'un cendrier.

En bois sculpté, en métal ciselé, l'animal sert naturellement de support aux services de fourchettes à CAGOUILLES. La vogue de la CAGOUILLE, modèle décoratif, semble aujourd'hui plus grande que jamais.

 

         parlons de La Cagouille et la PEINTURE,

      Les Peintres et les Dessinateurs n'ont sans doute pas pris la CAGOUILLE pour motif aussi souvent que l'ont fait les sculpteurs, mais nous retrouvons cependant dans leurs oeuvres notre glissant compagnon. Dans ses cahiers, VILLARD DE HONNECOURT du XIII ième siècle, a laissé le dessin d'une CAGOUILLE d'une allure franchement comique avec sa coquille plus haute que large, sa double paire de cornes imposantes, son attitude presque belliqueuse.

Dans l'école hollandaise, tous les détails sont précis et fouillés aussi peut-on retrouver dans quelques natures mortes de délicats limaçons. On peut signaler par ailleurs : "Le goût et le tact" de BREUGHEL (XVI ème siècle), puis : "Diverse qualita du frutta et animali" (RUYSCH, XVII ème siècle). La plupart des tableaux de fleurs de l'école de BREUGHEL DE VELOURS (XVII ème siècle) nous montrent, parmi les pétales et les feuilles de ravissants petites CAGOUILLES, menues et bigarrées, à peine plus grosses que des mouches, et parfois un PETIT GRIS rendu à la perfection. Dans un autre tableau, RUYSCH RACHEL fait subir à une CAGOUILLE perchée sur le bord d'une pierre, le supplice de Tantale devant un amoncellement de fruits. 

Sur une gravure du XVI ème siècle on peut voir la tête d'un vieux guerrier coiffé d'un bonnet en forme de CAGOUILLE. Un amour, juché sur le sommet de la coquille trouve cette monture à son goût et tâche, semble-t-il de la diriger en arrière. Qu'a voulu dire l'auteur ? Le vieillard coudrait-il remonter lentement le cours du temps, guidé par ce jeune compagnon ? CALLOT (XVII ème siècle) a laissé au Musée des Offices, à Florence, un dessin humoristique intitulé : "L'Homme aux ESCARGOTS". Ils s'en échappent dun plat. Ils "courent" au-devant de l'Homme qui semble les fasciner. Déjà, une double rangée de bêtes lui font une vivante bandoulière, alors que le plus beau, le plus hardi, se dresse superbement sur son index pointe. Tout est cornes, celles des bêtes, les plmes du chapeau, les mèches des cheveux, la barbe séparée en deux pointes à la manière des chèvres, les doigt eux-mêmes dressés. L'impression est celle d'une sympathie réciproque de l'Homme et des bêtes.   Les Japonais l'utilisent dans leurs sujets de décoration.

 

 

      LA CAGOUILLE et les miniatures, la Tapisserie,

il faut faire une mention toute spéciale,parmi les miniatures, aux enluminures des XVme et XVIme siècles. Il est peu de pages du livre d'heures d'Anne de BRETAGNE, merveilleux manuscrit décoré par BOURDICHON, dont les fleurs qui l'ornent ne soient accompagnées d'escargots.

Les "Très  riches heures du Duc de Berry"  contiennent une scène de l'Evangile : "La multiplication des pains" dont la décoration retient l'escargot comme élément principal.

En Italie, au XVIme siècle, un manuscrit décoré a l'intention du Pape Grégoire XIII (école de Raphaël) présente également des motifs floraux àù l'escargot apparaît fréquemment.

Enfin, au XIXme siècle, les artistes se sont inspirés directement des enluminures des XVme et XVIme siècles pour décorer les livres pieux : Imitation de Notre Seigneur Jésus Christ, Evangiles selon Saint Mathieu, Saint Jean, ... et nous y retrouvons là encore, ce limaçon, ce silencieux compagnon de la nature.

La somptuosité des tapisseries ne dédaigne pas l'escargot. Il accompagne les verdures des XVme et XVIme siècles, sur lesquelles il jette des note claires et vivantes (Ateliers d'Enghein, Manufacture des Gobelins).